Chronique
par Thomas Wild, pasteur

Jean-Pierre Filiu, historien spécialiste du Moyen Orient, est intervenu lors d’un forum organisé par la Communion protestante luthéro-réformée en avril 2025 pour présenter quelques thèses de son ouvrage Comment la Palestine fut perdue et pourquoi Israël n’a pas gagné (Seuil, 2024). Pour lui, Jimmy Carter, 39e président des USA (1977-1981) a fait du « bon boulot », contrairement à ses successeurs. Chrétien convaincu, il a réussi, au prix de mille efforts, à établir un accord cadre pour une coexistence entre Israéliens et Palestiniens. Et il a continué à militer pour la cause de la paix après son mandat de président ! Pour Filiu, il n’y a pas de solution hors la paix. Sinon ce sera un bain de sang sans fin.
En ce temps de l’Avent et de Noël résonnent autour de nous de multiples chants et souhaits de paix. Même les téléfilms de Noël s’y mettent, avec des histoires qui se terminent toujours bien. Les anges disaient aux bergers : « Paix aux hommes de bonne volonté ! » Je les entends, mais je me sens perdu devant le déferlement des images de violence qui nous parviennent. Ce qui m’aide au jour le jour, c’est le témoignage des ouvriers de paix.
Ce printemps, j’ai photographié sous tous ses angles le mot « résister » gravé dans la pierre par Marie Durand, prisonnière pendant 38 ans dans la Tour de Constance. Devant ces lettres torturées, j’ai ressenti les luttes intérieures et l’effort de cette croyante pour rester fidèle à sa foi. Je pense aussi à Dietrich Bonhoeffer, s’attaquant au régime nazi, à Albert Schweitzer, militant contre la bombe atomique, à Martin Luther King, rêvant d’un monde sans racisme et agissant en conséquence.
J’ai récemment découvert l’action de Daoud Nassar. La Cour suprême israélienne a reconnu la légitimité de la demande de ce luthérien arabe vivant en Cisjordanie, près de Bethléem, qui souhaite récupérer sa ferme de 42 ha, déclarée « terre d’État ». Avec des volontaires internationaux, il gère une « tente des nations », régulièrement cible d’attaques de la part de colons. Sa lutte est strictement non-violente*.
Je me suis dit que c’est peut-être là justement, sur ces terres déchirées, que les bergers faisaient paître leurs troupeaux, et que les anges ont proclamé « Paix sur la terre aux hommes de bonne volonté ». C’est là que Jésus a choisi de naître, fragile enfant. Au milieu de l’obscurité de ce monde, il fait briller pour nous la lumière.
* https://www.lenouveaumessager.fr/articles/solidarite/-nous-refusons-d-etre-ennemis-
Focus
Promouvoir la réconciliation
Parmi les nombreuses initiatives locales, les mouvements et les ONG, IFOR, Church and Peace et Friedensdekade sont trois organisations chrétiennes engagées dans la promotion de la paix, de la non-violence et de la réconciliation. IFOR (International Fellowship of Reconciliation – Mouvement international de la Réconciliation), fondé en 1914, regroupe des individus et des groupes à travers plus de 50 pays, et agit pour prévenir les conflits armés, soutenir les victimes de violence et former à la résolution pacifique des conflits. L’organisation mène des programmes éducatifs, organise des conférences internationales et encourage des initiatives locales de justice sociale et de réconciliation. Church and Peace (Église et Paix), créé en 1952, relie des communautés chrétiennes européennes autour de la non-violence et de la paix, en favorisant le dialogue oecuménique, la formation à la médiation et la participation des jeunes à des projets transfrontaliers. La Friedensdekade (Décade pour la paix) mobilise chaque année, pendant dix jours avant l'Avent, Églises, paroisses et mouvements chrétiens, principalement en Allemagne. Elle propose des offices, des conférences, des ateliers et des actions publiques pour sensibiliser les fidèles et le grand public aux conflits mondiaux, à la non-violence et aux moyens concrets de favoriser la réconciliation.