Benjamin Martzloff, professeur des écoles en classe de CM1 à Wickersheim
« Le 13 mars, les enfants ont compris qu’ils ne reviendraient pas de sitôt en classe. Ça m’a fait mal : l’école à distance n’est pas l’école. Il a fallu à tous un temps d’adaptation. Je leur ai envoyé des exercices de français et de mathématiques,
rien de nouveau car si on introduit mal les choses, ça peut être très dur par la suite. Mais je n’avais pas imaginé que ça durerait si longtemps. Alors on a fait des sciences, des choses que je n’aurais pas abordées en temps normal. La priorité étaient qu’ils gardent un rythme et restent curieux.
C’est ma première année dans le métier, mais de toute façon, là, on était tous débutants. Cette situation m’a rapproché des parents, qu’on ne voyait jamais avant, la majorité des élèves venant en bus, d’autres villages. On échangeait régulièrement, par mails surtout. On a géré ensemble. J’ai reçu beaucoup de reconnaissance de leur part. À l’avenir, je continuerai à entretenir ce lien avec eux. Après le déconfinement, j’ai d’abord alterné une présence à l’école avec le peu d’enfants de retour, et un suivi à distance pour les autres. Le bouche à oreille a rassuré et les enfants sont progressivement revenus. Ils en avaient besoin, pour revoir les copains et d’autres adultes. C’est l’aspect social qui primait. Ils ont dit que ça avait été très difficile à la maison. Ils se sont étonnamment adaptés aux règles de distanciation. À la récré, ils inventent de nouveaux jeux. Je vais retrouver ma classe le 22 juin. On va surtout faire du vivre ensemble, comme pour un début d’année, des choses ludiques pour finir d’une belle manière et tous ensemble. Je n’oublierai pas ces premiers élèves, que je ne reverrai pas puisque j’enseignerai ailleurs l’an prochain. Mais tous seront-ils au rendez-vous ? Je n’ai plus eu de nouvelles de certains. En septembre, en plus du retard pour tous, les écarts vont être terribles entre ceux qui ont eu un suivi impeccable et ceux que les parents n’ont pas accompagner. »
Propos recueillis par Claire Gandanger,