Plus d'un siècle d'esprit industriel protestant au Parc Wesserling

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L’écomusée textile du parc Wesserling retrace la riche histoire de l’industrie protestante alsacienne du XIXe siècle, marqué par un esprit d'innovation et un engagement social.

La vallée de Saint-Amarin se contemple par tous les temps. Par une grise journée de mai, les nuages bas qui baignent les sommets n’ôtent rien au charme verdoyant de l’arrivée dans la petite gare de Husseren-Wesserling, à une heure de Mulhouse. Dans le parc Wesserling, les paysagistes mettent leurs dernières touches aux sculptures végétales d’ogres avant l’ouverture du festival des Jardins Métissés, consacré cette année au Chat botté et qui se tiendra jusqu’au 19 octobre. Des cars déposent des touristes à l’entrée du château des manufacturiers, dominant les usines et leurs trois siècles d’histoire. De 1800 à 1930, cette épopée textile a été portée par l’engagement d’une dynastie de patrons protestants calvinistes chassés de la Suisse voisine, les Gros-Roman. Le musée du château offre une plongée inédite dans l’esprit protestant de cet âge d’or de l’industrie alsacienne. La maison Wesserling en offre une illustration aussi emblématique que singulière, à partir des archives patronales du site et de celles de la Société Industrielle de Mulhouse (SIM), fondée en 1825. Pour ce chapitre, pas de sources ouvrières. Les syndicats s’organiseront plus tard. Les derniers biens du site ayant été dispersés aux enchères après sa cessation d’activité en 2003, les collections d’objets sont des reconstitutions. « On peut tout toucher. C’est un musée vivant », s’enthousiasme François Tacquard, président de l’association de gestion du parc Wesserling et ex-président de la Communauté de communes de Saint-Amarin.
À partir de 1762, des bourgeois protestants prennent en charge la manufacture d’indiennage aux pourtours de la France. Elle y est alors prohibée mais prisée jusqu’à la Cour. À partir de cette compétence, les Gros- Roman vont diriger la maison Wesserling sur six générations, alliés à de grandes familles mulhousiennes. Ils sont à la pointe des innovations et vont devenir experts de tous les savoir-faire du textile de l’époque : impression, filature, blanchissement… « En 1850, l’empire Wesserling est la plus grande usine d’Alsace, réputée mondialement pour ses tissus, et emploie 5000 ouvriers », rappelle François Tacquard. « Les patrons s’appuient sur une population ouvrière locale aux fortes traditions agricoles. » La communauté des cadres résidents au château, « le petit Paris », dispose de sa chapelle réformée mais soutient la foi catholique des ouvriers, avec la conviction qu’une bonne pratique religieuse tempère les comportements*. En 1854, Jacques-Gabriel Gros et Aimé-Philippe Roman financent la construction de l’église catholique du village d’Husseren. Les paroissiens la baptiseront Saint Philippe et Saint Jacques.

Stratégie sociale

« J’ai retrouvé des lettres de dons écrites de la main des patrons et de leurs épouses qui révèlent leur grande proximité avec la population », rapporte Claudine Graber, présidente du conseil presbytéral voisin de Thann-Vallée de la Thur et qui a contribué aux panneaux. « J’ai surtout perçu leur paternalisme comme un accompagnement. »
Dès le milieu du XIXe siècle, la SIM défend la prévention des accidents, la protection des ouvrières et de leur maternité, la limitation du travail des enfants et leur éducation. Ses combats politiques au plan national visent à consolider sa stratégie sociale régionale sans qu’elle ne soit désavantagée face à ses concurrents. Wesserling est en avance dans ses décisions, mettant en place la gratuité des frais médicaux pour les travailleurs dès 1816, ou encore de premières caisses de secours dès 1825. Très tôt, la maison impulse l’instruction dans la vallée et la promotion interne. « En 1859, des ouvriers figurent dans la liste des participants au cercle de lecture du “Petit Paris” aux côté des cadres », observe François Tacquard. Lors des chutes d’activité, les patrons facilitent l’accès au pain et organisent des chantiers collectifs. Autant de pratiques qui permettent de prévenir les mouvements sociaux, malgré les bas salaires. Avec plusieurs niveaux de lecture et des visites théâtralisées, le musée s’adresse aussi bien aux familles qu’aux érudits. Plusieurs paroisses l’ont déjà choisi pour leurs excursions.

Claire Gandanger,
journaliste

* Les fonctionnaires allemands ne fondent la paroisse luthérienne à Fellering qu’en 1911.

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