
Un mensonge volontaire réussi est celui qui ajoute une petite part de vérité à une fiction élaborée. Après tout, mentir demande de l’imagination et une capacité à inventer une histoire. Pour être crédible, il faut de la cohérence. Ainsi le mensonge nous projette dans un monde qui n’existe pas et fausse notre perception de nous-mêmes et des autres. D’autant plus, si le mensonge est utilisé pour manipuler et convaincre, pour discréditer et humilier. Lorsque nous dévoilons le menteur ou la menteuse, viennent alors la méfiance, la défiance, la paranoïa, la déception, la colère… Notre lien aux autres se fragilise, nos certitudes sont ébranlées, notre conception du vrai et du faux est remise en question. Tous les mensonges ne bouleversent pas le cours de nos vies ou n’érodent pas complètement notre confiance dans les autres. Malgré cela, à chaque mensonge, les liens se défont toujours un peu plus. Le tissu se détend. La parole du menteur ou de la menteuse est difficilement crue et toujours scrutée pour détecter ce qui est vrai et sincère. Les échanges risquent de devenir petit à petit hypocrites et faux.
Selon le philosophe Olivier Abel : « Pour penser le mensonge et la vérité, on a besoin de la pluralité du langage. De voir comment peut s’établir le pacte de confiance dans les différents genres de langage. Mais, globalement ce qui est affecté par le faux, c’est la confiance dans le langage, c’est-à-dire le niveau de ‘sécurité langagière’ disait Paul Ricoeur, le niveau de fiabilité langagière qui est la condition sine qua non de notre vivre ensemble. Lorsque nous décrédibilisons le langage de l’autre, nous ruinons cette fiabilité langagière et donc la possibilité de vivre ensemble » (extrait de M comme mensonge par Olivier Abel, l’Abécédaire protestant, vidéo de Campus protestant, 2021).
Un mensonge, en étalant faux-semblants et illusions, masque une vérité.
Toute la question reste de savoir quelle vérité nous souhaitons et comment nous voulons la découvrir.
Gwenaelle Brixius,
rédactrice en chef
mai-juin 2025