Albert Schweitzer assis sur le bord d’une fontaine de la place Saint-Thomas, le regard tourné vers l’église où il a officié dans ses jeunes années, avant de partir à Lambaréné au Gabon ouvrir un hôpital. Tel est l’hommage qu’un comité composé d’institutions protestantes et de personnalités alsaciennes a souhaité rendre à ce protestant hors norme.

10_Schweitzer.JPGEn 2021, choisir d’ériger la statue d’un homme sur une place pouvait paraître bien académique. Pourtant les propositions des cinq artistes retenus pour le concours ont été variées : bustes, statue à échelle humaine, et même art contemporain... Le jury s’est finalement enthousiasmé pour la sculptrice suisse Simone Mayor avec un Albert Schweitzer à hauteur d’hommes, parmi les gens. « Je ne le voyais pas sur un piédestal au milieu de la place », évacue-t-elle.

C’est un souvenir d’enfance qui a mené l’artiste à concourir. « Une dame venait souvent collecter de l’argent pour l’hôpital de Lambaréné. Ma mère l’invitait à prendre le café. J’ai eu envie d’en savoir plus sur le personnage. Quand je fais des concours, c’est que j’ai envie de découvrir quelque chose qui me touche. » L’artiste s’est alors mise à lire, beaucoup. Un travail d’approche de quatre mois, avant même de savoir si elle pourrait participer au concours. Elle s’imprègne de la pensée humaniste du médecin théologien, puis modèle dans l’argile une maquette pour la présenter en temps voulu.

Artiste porte-parole

Le jury attendait un Albert Schweitzer sous les traits de sa jeunesse strasbourgeoise. Simone Mayor a pris la liberté de s’écarter de la consigne. « Je préfère les visages un peu marqués de ceux qui ont vécu, confie-t-elle Je l’ai voulu ni jeune, ni vieux, plus facilement reconnaissable. » Finalement, la simplicité que dégage cette proposition et son insertion dans l’architecture de la place l’emportent. La sculptrice assume le rôle d’artiste porte-parole. « J’ai toujours envie que mon travail dise quelque chose. » Pas simple de trancher tant le prix Nobel de la paix aux multiples engagements est impossible à résumer. « Le cahier des charges comportait des citations pour nous orienter. Mais je me suis sentie complètement libre quant au message à délivrer, explique la Suisse. J’ai voulu porter son humilité. »

Pour Simone Mayor, le portrait est « une écriture ». « C’est un long travail de saisir l’âme de quelqu’un, à partir de photos. Mon approche est plutôt expressionniste, prévient-elle. Je ne fais pas du copier-coller. » L’artiste sait que le chemin n’est jamais tracé. Mais cette fois, pas d’échec possible : « J’avais gagné le concours, je devais aller au bout. Je me suis sentie responsable de l’œuvre. » Celle-ci a commencé à l’habiter quand les traits d’Albert Schweitzer sont apparus sous ses doigts. « Je le voyais devenir vivant dans la cire, confie-t-elle. Pendant des mois, je n’ai rien pu faire d’autre. » Après avoir minutieusement sculpté un bloc de cire de deux mètres de haut puis coulé le bronze qui constituera la statue définitive, 

l’ultime étape va être de lui donner les derniers coups de ciselage et de vernis. Et puis il lui faudra la lâcher. « On pourrait toujours aller plus loin, mais il faut laisser l’œuvre faire son chemin. Une fois sur la place, elle ne m’appartiendra plus. Elle appartiendra aux enfants qui grimperont dessus, aux touristes qui s’interrogeront... Comment sera-t-elle reçue ? Cela donne un peu la boule au ventre. »

Claire Gandanger

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